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Après l'éducation, l'écriture inclusive interroge aussi les médias

Destinée à mettre sur un pied d'égalité linguistique les femmes et les hommes, l'écriture inclusive, qui agite le monde de l'éducation, questionne aussi certains médias.

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Après l'éducation, l'écriture inclusive interroge aussi les médias
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Mis en ligne le 13/11/2017

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Ecriture inclusive

Le site Slate (4 millions d'utilisateurs en octobre) a annoncé mardi qu'il appliquerait dans ses papiers, parmi les nombreuses propositions de l'écriture inclusive, la "règle de proximité", qui consiste à accorder les adjectifs avec le terme le plus rapproché, faisant fi du principe "le masculin l'emporte sur le féminin".

Le site préférera aussi employer des mots épicènes, dont la forme ne varie pas entre le masculin et le féminin (un.e élève, un.e membre).

Jusqu'à cette décision, seules des organisations (syndicats, associations, notamment LGBT) et des médias militants comme le site féminin Madmoizelle, la revue lesbienne Well well well ou la revue d'enquêtes sociales Z pratiquaient ces règles.

Individuellement, certaines journalistes doublaient d'elles-mêmes occasionnellement les mots ("enseignantes et enseignants").

Tests et réflexions

Depuis les années 1990 et la nomination d'Edith Cresson comme Premier ministre, le journal du soir a féminisé progressivement les noms de fonctions et de professions.

La question évolue et "l'important est d'en parler avec la rédaction", a déclaré à l'AFP son directeur Jérôme Fenoglio.

Le Monde va bientôt "tester" l'accord de proximité dans une édition de son supplément "Idées" consacré à ces questions, a-t-il indiqué.

La question devra faire l'objet d'une concertation élargie à tous les médias de service public, a pour sa part indiqué la direction du site franceinfo.

Une centaine de journalistes, en grande majorité des femmes, se sont réunies jeudi à Paris pour une table ronde organisée par le collectif féministe "Prenons la Une".

A une époque où la plupart des nouveaux journalistes sont des femmes, un passage au "langage inclusif" à l'écrit voire à l'oral, pourrait avoir de l'influence car les médias ont "un effet de légitimation et de contamination", estime Eliane Viennot, professeure de littérature, historienne, et figure de ce mouvement. "On est devant des luttes très concrètes pour arrêter la domination masculine", a-t-elle souligné.

Chez Madmoizelle, "ça fait cinq ans qu'on le fait et certains lecteurs n'ont rien remarqué", a affirmé sa rédactrice en chef Clémence Bodoc. Le site se "retient" cependant de l'utiliser dans les titres, "par souci de lisibilité".

"Pour l'heure, l'écriture inclusive, avec les difficultés de lisibilité qu'elle engendre, ne me paraît pas la meilleure piste pour donner aux femmes la visibilité qui leur revient", estime pour sa part Michèle Léridon, directrice de l'information à l'AFP, rappelant qu'une réflexion sur la place des femmes dans la production de l'agence (dépêches mais aussi photos, vidéos...) a été lancée.

Rebelles de la grammaire

De nombreux médias ne se posent pas la question mais d'autres s'y opposent totalement, esentiellement à droite.

Pour le rédacteur en chef du journal L'Opinion, Rémi Godeau, les défenseur.e.s de l'écriture inclusive "font fausse route": "Au prétexte du refus d'un symbole de domination d'un sexe sur l'autre, les rebelles de la grammaire valorisent la désobéissance", condamne-t-il dans une tribune parue jeudi à propos de professeurs qui défendent cette nouvelle règle.

La spécialiste de l'Education du Figaro Marie-Estelle Pech a quant à elle dénoncé une "manière incongrue d'écrire le français" et "une nouvelle concession à un féminisme militant", dans un article paru en octobre.

Ils sont en accord avec les institutions, qui restent réticentes à cette évolution du langage, malgré la publication en 2015 d'un guide pour une communication "sans stéréotype", par le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes.

L'Académie française a qualifié l'écriture inclusive de "péril mortel" pour la langue française; la secrétaire d'Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes s'est elle montrée dubitative sur l'enseignement du point médian (les Français.e.s par exemple).

(Source AFP)

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