L’évidence a sauté aux yeux de tous lors de l’ultime cérémonie d’hommage à Pierre Seel, le 22 avril à l’Hôtel de Ville de Paris, lorsque Jean Le Bitoux, président fondateur du Mémorial de la Déportation, a rappelé que Pierre Seel, décédé le 25 novembre 2005, était tout à la fois le "premier et le dernier témoin (…) d’un carnage officiel" : celui de la déportation homosexuelle depuis la France. Le premier, en effet, à avoir surmonté les pressions extérieures et l’autocensure avec "son ouvrage (1) et son courage" témoigner de ce qu’il a subi, vécu et vu. Le dernier aussi, parce qu’aucun autre témoin français de cette déportation ne s’est manifesté et qu’il n’y a guère désormais de chance que cela se produise.

Du coup, cet hommage spécifique, en présence de quelques 80 personnes (militants, présidents d’associations LGBT, élus…), était bien le moins que les homos puissent faire en souvenir de ce "citoyen exigeant et de ce contestataire valeureux" selon les mots de Jean Le Bitoux. Et ce d’autant que Pierre Seel ne pourra pas recevoir la légion d’honneur à titre posthume. Une distinction qui aurait pourtant conforté l’apport indispensable à notre histoire qu’a constitué son témoignage unique.

Adjointe de Bertrand Delanoë, la députée (PS) Danielle Hoffman-Rispal a, elle aussi, rappelé le parcours de Pierre Seel et affirmé "l’indéfectible contribution au nécessaire travail de la mémoire sans exclusive aucune" de Paris, dont l’accueil de cette cérémonie témoignait. "La mémoire nous impose une responsabilité pour l’avenir, a rappelé la députée. Il en va de notre intégrité et de notre salut."

Jean-François Laforgerie

(1) Jean Le Bitoux a convaincu Pierre Seel de publier son témoignage et l’a aidé à le mettre en forme : "Les oubliés de la mémoire", éditions Calmann-Lévy.

Lire notre dossier "Pierre Seel, témoin unique".

Mis en ligne le 24/04/06