
Pape François
Une seule phrase sur les gays et tout change?
Une seule phrase de François sur les homosexuels: "Qui suis-je pour juger?" semble avoir décrispé les relations entre le monde moderne et la papauté, même si le pape argentin, loin d'être révolutionnaire, semble surtout attaché à rendre le christianisme proche des gens.
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Une seule phrase sur les gays et tout change?
Pape François
Mis en ligne le 02/08/2013
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C'est surtout un style et le rôle du pape qui semblent avoir subtilement changé, ont commenté les éditorialistes du monde entier.
Les associations homosexuelles ont salué ces paroles de respect, même si elles relèvent avec raison que rien n'a bougé sur la doctrine, qui distingue la personne de l'acte homosexuel, toujours réprouvé.
"Si quelqu'un est gay et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour le juger?". Cette phrase a suscité une empathie démesurée à la hauteur de l'incompréhension que suscitait parfois Joseph Ratzinger. Et, dans une moindre mesure, les autres phrases sur l'approfondissement du rôle des femmes dans l'Église et la miséricorde pour les divorcés remariés.
L'empathie se retrouve dans les analyses des médias les plus influents, et peu importe que François ait fermé la porte à des revendications comme l'ordination des femmes, et qu'il ait insisté sur le pardon de Dieu, donc sur la reconnaissance de la faute, conformément à la doctrine catholique la plus ancrée.
Ces gestes et ces phrases, et l'abord direct des gens par le pape inquiètent profondément les plus traditionalistes.
Ainsi pour l'historien italien Roberto de Mattei, le pape "est en train de devenir un personnage de roman-photo, de talk-show. Tout devient superficiel, gestuel. Nous perdons les contenus et la substance", écrit-il dans le quotidien de droite Il Foglio.
Dans l'avion qui le ramenait de Rio de Janeiro à Rome, François a parlé pendant une heure et quart sans filet aux journalistes, n'esquivant aucune question. Il a été applaudi.
Des propos très maîtrisés, mais témoignant d'une ouverture aux problèmes que se posent les contemporains. Et aussi une expression libre. Ainsi jamais le mot "gay" n'avait franchi les lèvres de ses prédécesseurs.
Jorge Mario Bergoglio avait été élu notamment par les cardinaux pour rapprocher l'Église de ses fidèles.
Il semble vouloir dépasser une polarisation autour des sujets liés à la sexualité --que surtout Jean Paul II avait mis en avant-- et qui a contribué à éloigner de l'Eglise une grande partie des dernières générations.
Le journal américain The New Yorker, observe: "François semble demander: pouvons-nous parler d'autre chose?". "François ressemble à un champion d'échecs qui utilise son cavalier, le seul pion capable de sauter au dessus des autres, pour échapper à une situation de blocage (...) Il se peut que François gagne simplement en refusant de s'engager dans une guerre culturelle" sur les questions de moeurs.
Lors de son voyage au Brésil, il a affiné sa doctrine dans d'importants discours. Il veut que le prêtre soit radical, près des plus pauvres, qu'il refuse le carriérisme, la mondanité, et aussi bien la politisation de l'Évangile que le passéisme.
Il a critiqué dans l'Eglise les "groupes d'élite" qui se vantent d'avoir une "spiritualité supérieure".
Il a fait l'éloge sans cesse pendant son voyage de la religion populaire, affirmant que la foi des pauvres a des intuitions bien meilleures sur Dieu que des prêtres qui font de grands développements théologiques dans des salons "en prenant le thé"
Appelant les jeunes à Rio à aller "à contre-courant", ce pasteur conservateur les a encouragés à "se révolter" contre "la culture du provisoire", qui dit par exemple que "le mariage est démodé".
Il a condamné un individualisme destructeur. Il a invité les prêtres à chercher le dialogue, par exemple avec les athées et ceux qui sont attirés par les sectes et les groupes pentecôtistes. Cela constitue un encouragement aux nouveaux mouvements d'Église au langage direct et enthousiaste.
Radicalisme évangélique et dialogue vont de pair. Le pape François, en insistant sur la "miséricorde", prône une attitude bien plus positive vis à vis des personnes en difficulté dans leurs situations concrètes: une Église qui juge et exclue moins.
Devant les évêques du continent, il a fustigé une attitude cléricale de beaucoup de prêtres qui mesurent la foi des fidèles et décrètent qu'ils "ne sont pas en règle". C'est cela surtout qui doit changer avec François.
(Source AFP)