Familles monoparentales, divorcés, homosexuels... "L'église ne peut pas se contenter d'être dans un discours exhortatif et prescriptif mais doit adopter une démarche d'accompagnement humain", estime l'évêque du Havre, auteur de "Les familles, l'Eglise et la société. La nouvelle donne" (Bayard), un livre d'entretiens avec le journaliste Christophe Henning.

"L'église ne peut se contenter d'accompagner les familles qui vont bien, qui sont 'dans les clous'" mais doit s'intéresser aussi à celles qui peuvent se sentir exclues de l'Église, explique le religieux.

Dans sa vision d'une Église bienveillante mais respectueuse des dogmes, Mgr Brunin s'inscrit dans la lignée des récents propos du pape François.

Celui-ci a appelé les prêtres à "accompagner" les homosexuels, les femmes ayant subi un avortement, les divorcés remariés, en prenant en compte leur "situation réelle". L'Eglise doit être, à ses yeux, comme "un hôpital de campagne" qui soigne les "blessures" de la vie dans l'urgence.

Mgr Brunin s'est "réjoui" de ces propos. "On avait certainement un problème de communication et je ne peux que me réjouir de voir un pape qui à la fois est ferme sur la loi, sur les éléments essentiels concernant l'avortement, le mariage, mais qui met en avant une attitude de miséricorde qui a été celle du Christ".

L'évêque considère ainsi qu' "on ne peut pas diaboliser la relation entre deux personnes homosexuelles. Il y a dans leur relation une qualité d'attention à l'autre, de confiance mutuelle". "Souvent les personnes n'ont pas choisi cette orientation sexuelle, elles le découvrent", ajoute l'homme d'Eglise.

"Ce qui est jugé 'désordonné' ce sont les actes homosexuels, pas les personnes", relève-t-il, en rappelant que l'Église demande à ces couples de vivre une relation d' "amitié chaste". "

Pour autant, Mgr Brunin ne renie rien de la mobilisation contre la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe. Il y a eu, selon lui, "une sorte de prise de conscience" de la "fragilité de la famille" et de la nécessité "de se mobiliser pour la défendre".

Tout en défendant une Église ouverte à tous, l'évêque rejette "tout relativisme": "tous les modèles familiaux ne se valent pas", souligne-t-il et "il vaut mieux pour élever un enfant qu'il y ait un père et une mère".

Selon lui, le pape Paul VI dans l'encyclique Humanitae vitae, en 1968, "pointait déjà les dérives dans lesquelles nous nous trouvons, 'l'enfant quand je veux'". Contre cette distinction entre l'acte sexuel et la fécondité, l'évêque prône une sexualité humanisée.

Il esquisse le visage d'une famille ouverte sur les autres et cite l'exemple positif de la famille musulmane qui "a davantage le souci de préserver la cohésion familiale au sens large". "Ce qui me frappe chez les jeunes musulmans c'est qu'ils ne sont jamais enfermés sur leurs relations entre époux et épouse, il y a toujours la présence de la belle-famille, des amis", explique l'évêque originaire du Nord, qui a officié à Roubaix et à Ajaccio puis au Havre. Il salue au passage le philosophe Tariq Ramadan, figure controversée, qui "invite à s'intégrer dans la société française sans désintégrer son islam".

(Avec AFP)